vendredi 10 février 2023

Atelier d'écriture du 28 janvier 2023

Cet atelier d'écriture était l'occasion de travailler autour de la contrainte.

L'exercice principal consistait à écrire une histoire courte à la première personne, avec quelques phrases données à l'avance, à insérer dans le texte. Le titre était également imposé, un titre par personne.

Le 2e exercice était l'écriture d'une brève de comptoir.



Zoé


« Je ne sais pas »

Je suis là, assise, debout et je réfléchis. Quoi ? Que dois-je faire ? Mais avant de prendre la décision qui peut chambouler la vie de mes partenaires, je dois vous expliquer précisément ce que je fais ici. J’appartiens à un groupe d’espionnage surentraîné qui se nomme « Les petits bouts ». Le but étant de déjouer un plan machiavélique mis au point par le criminel connu en France sous le nom de « Léonard le canard ». C’est un nom peu commun pour un super méchant, n’est-ce-pas ? Bref. Avec ma bande, j’ai réussi à m’introduire dans son quartier général communément appelé « Head quarter » pour les britanniques. Mais en arrivant, tout a changé. Littéralement. Je suis partie avec mon équipe moi, Beth, Lolo et petit pois (oui le but est d’avoir un nom de code pour se repérer facilement en mission) et j’ai escaladé avec eux le mur en béton avec les cordes 3000 ultras-résistantes pour arriver à attraper la clenche de la porte située tout en haut du bâtiment, afin de passer de manière discrète. Ce fut loupé. Ce satané de Léonard le Canard m’avait repéré au moment où nous sommes rentrés dans son super quartier. La discrétion et nous cela fait deux et ce qui s’est passé ensuite, vous allez pas le croire. A l’approche d’une intersection, je ne voyais plus que son poil long, noir et épais qui dépassait de son nez. Et ce fut là que tout a basculé. Il se jeta sur moi et m’emmena loin de mon équipe qui fut projeté en arrière par son méga aimant puissant capable de mettre à terre quiconque s’approchant de cet instrument. J’arrivai en sa compagnie dans, ce que je pense, sa salle favorite avec sur une table basse, deux coupes de champagne. Dedans, les bulles étaient pétillantes à souhait. Il me posa sur un de ces canapés durs et froids qui composaient cette vaste pièce, et me proposa un marché. Dans une semaine, un braquage à la banque de Buenos Aires, d’une valeur de 2,636,842,805 euros. Il avait besoin d’une experte pour pouvoir ouvrir le coffre central qui contenait l’argent. Or, il n’y avait que moi qui sache le faire. Et c’est là qu’il me proposa de venir avec lui au braquage et en échange, mes co-équipiers seraient libérés. Mais, si je refuse, ceux-ci seront envoyés en prison à perpétuité pour espionnage et trahison à la nation à l’aide de preuves factices qu’il pourrait créer lui-même. Les juges seront tellement naïfs que le procès ne se passera pas en 3 heures mais en 10 minutes (J’exagère). Et c’est là que je vous retrouve maintenant, dans ma situation actuelle, à savoir ce que je dois faire. Je ne sais pas. Je réfléchis. Et d’un coup, une idée brillante me vient à l’esprit. Revenons en arrière. Avant de partir en mission, je me souviens m’être mise sur mon TEE-SHIRT en dessous de ma veste, un capteur permettant d’écouter les conversations de n’importe qui parlant jusqu’à 10 m de moi. Cela veut donc dire que je viens d’enregistrer la conversation qui a eu lieu tout de suite, je peux donc refuser de participer à son projet fantabulesque et partir en l’inculpant pour avoir créé de fausses preuves ! Je me lève et cours. Je vois au loin mes amis à terre, et les relèvent un par un, malgré leur état pitoyable. Derrière moi, les gardes qui nous rattrapent. Que faire ? Pas le temps de redescendre. Je décide donc de les affronter jusqu’à les rendre inconscients. Et c’est ainsi que mon histoire se termine. Echapper à Léonard le Canard et l’inculper après 10 ans de recherches intensives à son sujet.

 


Marie

 

« La chaussure »


C'était le dimanche. Je me réveillais d'un coup, sans sonnerie, avec entrain. Le beau temps était annoncé. Sitôt le p'tit déj' avalé, je préparais mes affaires. L'alu sur le sandwich, le sandwich dans le sac et le sac sur le dos, j'étais prête. Plus qu'à enfiler mes chaussures, mes croquenauds disait mon père. Marie y es-tu ? Je mettais mes chaussettes. Marie y es-tu ? Je mettais mes lacets. Marie y es-tu ? J'oubliais, des fois mon écharpe, des fois mes gants. Peu importe, on était déjà dans la voiture, mon père et son bonnet vert, mon frère et sa gourde remplie de bulles pétillantes, moi et ma chaussure tachée de bleu. Le trajet était toujours un poil long mais une fois sur place, la ville derrière et les sommets devant, nous n'attendions que ça : gravir la montagne et savourer nos chips sur un 360 °.

A chaque fois, nous, habitants du plat pays, étions ivres de beauté ; à chaque fois, nous nous disions en silence : on n'a jamais imaginé ça. Et mon regard de reposer sur la tâche bleue de ma chaussure. Aux anges.



Mickaël

 

« Un homme et un chat »

Je suis un chat, euh attends ce n’est pas ce qu’elle a dit… Mais, qu’a-t-elle dit déjà ? Un homme est un chat, un homme et un chat, un homme hait un chat… ? Bon, qu’importe, je pars là-dessus. Je suis un chat donc. Je me lève, il est 15h00, encore une sieste de 18h, bah quoi ? Normal non ?

Je baille, m’étire de tout mon long en plantant mes griffes dans le tapis quand soudain, j’aperçois mon humain tout décoiffé comme d’hab. Aujourd’hui son nez aussi est décoiffé, je ne vois plus que ça, ce long poil noir qui dépasse de sa narine. Il bouge de gauche à droite sur sa moustache, j’ai envie de sauter dessus mais me retiens et décide finalement de jouer avec ma fausse souris en plastique. C’est mieux comme ça, si je l’abîme qui va me donner mes croquettes ? Faut que j’en prenne soin, de mon humain. Comme lors de cette soirée où je le voyais boire jusqu’à plus soif d’innombrables coupes de champagne dont les bulles pétillantes à souhait m’ont fait perdre la tête et sauter dessus. C’était pour son bien et pour le mien aussi. Quand il a la gueule de bois il oublie ma gamelle et me fiche dehors si je miaule pour lui rappeler. Mais, pour une fois, le lendemain de cette soirée arrosée, mon assiette fut servie sans que je ne la réclame et surprise, dans ma gamelle d’eau, du champagne pétillant ! Si on me l’avait dit, je ne l’aurais jamais cru.


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- Hé Gégé, t’sais pas la dernière ?
- Bah non, mais quelque chose me dit quo va pas durer.
- Ouaip, je sais ce qui rend le rosé du père La pouche si bin.
- Ah ça c’est vrai qu’il est bin bon, mais qu’est quo l’est alors !?
- Parait que l’met de la fraise tagada dedans !
- De la fraise tagada !?
- Ouaip, o l’est bin tcheu !
- Mais qu’est-ce quo l’est que t’chette tagada là, o pousse dans son jardin ?
- Oh bé dame sans doute, l’est pas du genre à aller au Leclerc.

 

 

Camille

 

« Ça fume et ça rigole »

 

Ça fume et ça rigole
Jusqu’à l’aube pour oublier le temps
Ça boit et ça danse
Jusqu’à épuisement pour taire les peines

J’aime pas les réveils
J’essaye de les repousser, hélas je double leur haine et la mienne
J’adore rester en pyjama
Les jours où j’ai l’honneur de ne pas sortir de chez moi

Il faudrait ci, il faudrait ça
Ma lenteur s’endurcit dans ce grand fracas
Je ferais mieux de prioriser
Mes « tout doux listes » ont tout bien théorisé

Dans la pratique
Il y a des hics
Des pots, des hoquets
Heureux de trinquer

Ça fume,
Aussi vrai que la vie se consume
Ça rigole
La vie folle batifole

Je ne voyais plus que ce « poil long noir et épais qui poussait dans ma main »
Le couperai-je ? Le laisserai-je pousser ?
Demain plutôt… Demain peut-être…
De mes deux mains, le surlendemain

Après tout pourquoi là ?
Pourquoi se presser de faire ci ?
Se hâter de faire ça ?
Ça va me faire suer
Me faire soupirer

Je soupire déjà, remarquez
Rien que d’y penser
Rien que de crouler sous le poids
Des contraintes infinies

Vu le peu de jours qu’il reste
Avant, déjà, la fin du mois
Le peu d’années peut-être
Avant la fin de moi

La vaisselle, aujourd’hui,
Pas très envie
On pourrait la casser :
Ça serait l’occasion de la remplacer

Encore le ménage… ?!
Sans en faire tout un fromage,
A quoi bon si demain
Aussi sale le monde redevient ?

Le rangement,
A la limite, me détend
Pour mieux tout retransbahuter
Me voilà partie pour débazarder

Les vitres, c’est pas souvent
Mais vu sur le bureau ce qui m’attend
Ca me donnera l’illusion de profiter de
la lumière du jour, avant que la nuit accoure

Ce soir encore j’aurais voulu travailler mais
« Les bulles étaient pétillantes à souhait »
C’était mon anniversaire ; exception
Et ce soir c’est son anniversaire ; répétition

Les occasions ne manquent pas
Il suffit de les saisir avec joie
Et tant pis pour le reste
Qui dans mon cœur empeste

L’odeur du devoir
La moiteur de l’effort
L’horreur des jours noirs
Ô bain chaud de réconfort

Ah les normes, les devoirs
La coupe est pleine, je vous le dis !
De bulles fines de champagne
Faisant sur le brouhaha urbain rase campagne

« J’aurais jamais imaginé ça »
Les décennies si courtes
Les tâches infinies
Les travaux si durs
La retraite jamais mûre

J’m’en vais au fond de mon lit
M’autoproclamer en retraite, tant pis !
Au mépris de l’insomnie,
Qui tourne en boucle et me redit
Fais ça, fais ci !
Demain, parce qu’après il sera déjà lundi
Et pour une semaine
Le rythme fou, aura repris

J’me tire dans un autre pays,
Le plus longtemps possible, je m’enfuis
Loin de cette tyrannie
Qui fait de nos existences de drôles de vies

Retiens-moi, dansons !
Arrête ce mouvement, chantons !
Reste dans mes bras, rions !
Laisse la Terre en suspens, respirons !

Ça fume et ça rigole
Loin de l’enclume, des règles de ces marioles
Qui d’une plume, avec leurs injonctions folles
Ecument de leur cadence de carriole

Nous ne serons pas les chevaux de trait !
Sur cette course effrénée, tirons un trait !
L’appétit de l’ours est freinée si cesse notre attrait
Pour des bourses qui ne dérideront pas nos portraits

Ça fume et ça rigole
Pour échapper à cette course folle
Ça fume et ça rigole

En attendant que cesse la pluie
Ça fume et ça rigole
Les cœurs batifolent
Ça fume et ça rigole
Les contraintes s’envolent


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« Le caddie rouillé »


Regarde-moi ça :
V’là a zézette…
Où ça ?
Bah là ! Quoi… t’entends pas, son vieux caddy rouillé ?
Pffouah. Il était déjà bringuebalant le jour où elle l’a dégoté.
Il grince jusqu’à l’angle de la rue du Pont Neuf.
Paraît même qu’le père Ruffiot sert en hâte sa clientèle dès qu’il détecte le boucan du roulis strident. C’est Polo qui m’racontait : fissa fissa’l’les met dehors ses habitués en leur pressant le pas.
Il veut pas la voir.
Pourquoi ?
Parce qu’i’ peut pas la voir
Il peut pas blairer les scandales.
Elle l’a bien compris, la Cosette
Elle y fait son sketch.
Devant chez lui, ça s’arrête, ça s’attroupe
Il devient tout rouge
On croirait qu’il va faire une syncope
Une fois, il lui tend vite un paquet de boudins pour qu’elle fiche le camp
Elle l’engueulait presque, comme quoi qu’elle avait pas d’four
Et qu’la charité c’était pas s’débarrasser, qu’ça dispensait pas de réfléchir à s’mettre à la place des pauvres, qu’y voulait limite l’étouffer, l’empoisonner.
L’savait plus où s’foutre
Il s’est même excusé, le brave homme
Tellement Zézette elle a d’l’aplomb
Ce jour-là, elle s’est vu offrir trois tranches de pâté, pis des belles, une de chaque sorte.
Elle a ‘core réussi à le culpabiliser.
Résultat il a dû sortir de sa caisse une grosse pièce pour que Mademoiselle Zézette puisse s’acheter une baguette
Y’aurait encore eu des couverts jetables, il était bon pour lui fournir le couteau et l’assiette.
Nannn.
Ah bah si elle a pas froid aux yeux la Zézette
Y’a pas que les riches qui s’habituent à plus regarder la misère en face
J’voudrais pas dire mais quand même, y’a quand même des…



Sophie

 

« Tu me tiens, je te tiens »


Je le regarde fixement, il me regarde intensément. Ma main caresse à peine son menton, sa main serre le mien, un peu trop fort, mais je ne dis rien. Ça fait partie du jeu. Mes lèvres ne bougent pas, j’ai l’habitude. Ses lèvres s’entrouvrent régulièrement, un moment de déconcentration, puis se referment rapidement quand il se souvient qu’il doit rester sérieux. Très dur pour lui de canaliser son envie de rire. Combien de temps restons-nous dans cette bulle, je ne saurais le dire. Ne veut-il pas perdre ? Sans doute. Mais comprend-il aussi que s’il rompt le charme, la vie reprendra son cours et que je lui annoncerai avoir autre chose à faire, des choses sérieuses, des choses de grand personne… ? Et qu’il lui faudra trouver un autre jeu, mais y jouer seul. Je l’avais vite compris moi, il y a 30 ans de ça. Mon père travaillait du matin au soir, ne revenant que pour manger rapidement et se reposer dans sa chambre tout le reste du temps. Notre seul moment de rencontre était le dimanche, où je devais encore le partager avec mes frères et sœurs. Alors, ce moment-là où, les yeux dans les yeux, la main au bout du menton de l’autre, nous étions liés par ce jeu si simple, était ma bulle de joie à moi, pétillante comme les bulles d’une coupe de champagne. Une bulle chaque dimanche, qui suffisait à me donner l’ivresse de bonheur qui me faisait attendre le prochain rendez-vous hebdomadaire. Je me souviens encore parfaitement de son visage, à l’avoir tant de fois fixé, jusqu’à ce poil long, noir et épais qui dépassait de son nez. A la fin, je ne voyais plus que ça… Et c’est souvent ce qui finissait par me donner le fou rire que je voulais retarder au maximum ! C’est incroyable comme mon fils lui ressemble aujourd’hui, sans ce maudit poil qui dépassait évidemment. Mais voilà, je viens d’y penser, et je sens le sourire commencer à tirailler mes lèvres, mes yeux se plisser et cette fois c’est trop fort. Me voilà éclatant de rire, au grand plaisir de mon fils qui jubile d’avoir gagné. Tout ça pour un poil que mon père ne prenait pas la peine d’arracher, j’en ris encore 30 ans après. Je n’aurais jamais imaginé ça !


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Et les voilà qui recommencent !

- La Janine, elle a encore acheté une paire de talons hauts et une mini-jupe ! A son âge !

Et : - Le père Boulard, il a perdu sa jument. C’était pourtant une sacrée belle bête. Y a vraiment des coups durs dans la vie !

Mais pourquoi font-ils ça ? Parler pour parler ! Chacun raconte la sienne, en même temps que chacun paie sa tournée. Moi j’ai pas demandé à être là. Mais j’ai pas le choix, pour moi le samedi matin, c’est « Chez Lulu » que je le passe. Papa qui parle, qui boit, qui rigole et moi, dans mon coin, mon cocktail jus d’orange et grenadine avec trois fraises tagada sur un pic. Et je les entends discuter avec Papa, tous ses copains. Comment ne pas les entendre ?! Ils parlent si fort. Et le contenu !? Toujours différent, et toujours pareil. Et enfin cette phrase tant attendue :

- Allez, à la semaine prochaine les gars !

Et enfin nous quittons le bruit et l’odeur de café et d’alcool pour le bon air frais de la grand place.



Léonie


Je me souviens. A chaque fois que j’entends ce tube à la radio, je me souviens. Et c’est un bon souvenir même si la parodie était un peu piquante pour la personne concernée.

Quand cette parodie a été jouée, j’avais 19 ans. J’étais en deuxième année d’école d’infirmière. Et c’était au tour de ma promo d’organiser  le bizutage des première année.

Je n’aime pas les bizutages. Ils sont souvent basés sur l’humiliation des nouveaux. C’est d’ailleurs ce qui nous était arrivé l’année précédente quand c’était moi la première année.

J’écoute d’une oreille distraite les propositions fadasses de mes co-étudiants. On est une grosse promo – 126. Je peux donc rêver dans le fond de la classe.

Les idées sont classiques, bêtasses, inintéressantes.  Et cherchent toujours à embêter les nouvelles recrues.

Au bout d’un moment, je ne sais pas ce qui me prend, je lance tout fort : « et si on faisait un truc sur Paulette ? »

Silence, silence profond. L’organisation vient de dérailler. Hé oui, Paulette, c’est la directrice de l’établissement. Je vous la fait courte mais il faut quand même que je vous la présente, Paulette.

Petite, vraiment petite. Permanentée, toujours sapée de noir, talons les plus hauts possible. Et surtout, ongles longs manucurés, bagues multiples, bracelets tintinnabulants. Bref, le portrait de TOUT ce que ne peut pas, ne doit pas être une infirmière. Elle n’est pas crédible quand elle vient faire le cours sur l’hygiène des mains et la tenue professionnelle.

Après le silence c’est un bourdonnement de ruche qui s’élève du groupe. L’idée fait son chemin. Ok pour un truc sur Paulette. Mais quoi ?

Tu penses à quoi ?

Ben j’sais pas

T’as une idée ?

Ben non

Re-bourdonnement. Soudain une des filles chantonne t’as le look coco. Mais à la place de coco elle dit Paulette. Et ça le fait bien.

Voici la promo penchée sur la table, à réécrire la chanson de Laroche Valmont. 3 couplets. On parle des talons hauts, des mains manucurées, des bracelets tintinnabulants. Dommage qu’elle soit si bien apprêtée Paulette. On aurait pu parler d’un poil de nez noir qui dépasse. Bon à force de se triturer les méninges, la promo accouche de son pamphlet musical. Maintenant il faut décider de comment on va présenter ça. Alors bien sûr, on se tourne vers moi. Là, j’ai eu le temps de réfléchir.

Josiane ferait ça super.

Josiane c’est celle de la promo qui ressemble le plus à Paulette. Sauf que, comme elle est élève, elle n’a pas de hauts talons, pas de manucure, pas de bagues, pas de bracelets. Tout ça on peut arranger.

Josiane dit OK. Maintenant, yapuka.

-          Trouver la musique mais sans les paroles. Je vous rappelle qu’il y a 40 ans internet n’existait pas

-          Trouver les accessoires : dans une promo de 120 filles, c’est fastoche.

-          Apprendre les paroles qu’on chantera tous ensemble.

C’est parti. Le jour J arrive. On fait quelques blagues potaches pour les première année : enlever les chaussures qu’on met en tas ; poser une question hyper technique sur le métier …

Et l’apothéose. La parodie. Moi, je ne fais rien de spécial. Je regarde et je savoure. Les yeux des première année qui pétillent comme des bulles de cidre ; le sourire énorme des troisième année ; l’enthousiasme de ma promo. En fait c’était une pas si mauvaise idée que ça

La chanson se termine les élèves applaudissent et en redemandent ; l’équipe enseignante est figée : jamais, au grand jamais, quelqu’un n’avait osé s’attaquer à Paulette depuis toutes ses années de responsabilité.

Paulette se lève, remercie, vient embrasser Josiane et dit que c’est la première fois qu’on fait quelque chose comme ça pendant un bizutage.

L’après-midi reprend son cours.

Il y aura des suites : Paulette a convoqué Josiane pour savoir comment on en était arrivé là. Puis elle a convoqué les leaders de la promo. Ils ont fini par craquer et m’ont dénoncée.

Cela n’a fait que renforcer la rancune que Paulette me portait. Car vous l’avez compris, Paulette et moi, c’était pas le grand amour. Mais j’aurai jamais imaginé qu’elle avait si peu d’humour.



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Hé les filles, vous savez pour la Francine ? J’sais pas si je peux vous l’dire mais c'est gros. Elle a été arrêtée par les gendarmes. Si ! Si ! Ben, la s’maine dernière. Au Franprix. Passqu’elle avait fauché un caddy. Ouai, un caddy. J’te jure, elle est pas ben maline la Francine. Ah bon ? Elle a un caddy à elle ? T’es sûre ? Comment t’es sûre ? Il est tout rouillé ? Ha c’est vrai qu’ça f’rait pas top au Franprix un caddy rouillé. Mais alors, pourquoi qu’la maréchaussée ils l’ont arrêtée ?  A cause de c’qui y’avait dans son caddy rouillé ? Noooooon ? Pour de vrai ? Des escarpins Louboutin ? Y vendent ça au Franprix ?



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