Thème sensoriel : l’olfactif
Une boîte circule. On la sent, les yeux fermés.
3 ou 4 mots sur ce qu’on a senti - ou pas senti.
Inodore ? Quasiment. Discrète senteur de paillette, savonneuse, culinaire ?
A
 partir de ces impressions, écrire un texte sur un souvenir que cela 
déclencha, ou, de façon imaginaire, que nous vient-il à partir de ce 
déclencheur.
On peut utiliser les mots des autres lors de la description initiale.
Durée : 35 min
L’art du remplissage … des boîtes vides
La
 boîte circule. Une boîte ronde comme la table ronde autour de laquelle 
nous sommes ce matin réunis. Une boîte invisible, mystérieuse, et 
inodore à mes narines obstruées, passe de mains en mains. Par derrière 
les baies vitrées de la médiathèque, il pleut sur Lisieux. Il a plu 
toute la semaine d’ailleurs. L’air est imbibé d’humidité jusqu’à la 
moelle de son essence normande. Les poumons protestent, les bronches 
ronflent et les narines s’embouteillent. Au dehors, le marché bat son 
plein, les sonorités nasillardes de Noël se déclinent à toutes les 
sauces, françaises ou anglo-saxonnes, entrecoupées de messages 
publicitaires : « Profitez de notre offre promotionnelle unique », 
« Pour les fêtes, faites-vous plaisir », «  Aujourd’hui, 
exceptionnellement, le chapon à neuf euros quatre-vingt-dix-neuf le 
kilo, joyeux Noël à tous ». Malheureusement, le thème d’aujourd’hui, à 
l’atelier d’écriture, n’est pas celui de l’ouie. Des sonorités 
profondes, utérines et rythmiques, remontent des étages du bâtiment. 
Basse, djumbé et percussions, sont à l’œuvre au sous-sol, mais non, 
concentrons-nous, le thème du jour est l’olfaction, pas l’audition. 
Revenons à nos odeurs, supposées ou inventées, et décryptons ce qui peut
 l’être ; pour le reste, inventons. Les gouttes de pluie, lourdes et 
larges, s’écrasent sur les toiles colorées des stands de légumes qui ont
 l’avantage, eux, d’avoir une odeur reconnaissable, même les yeux 
fermés. Rondeur chaude et crémeuse du potiron. Amertume précoce du chou 
vert. Suavité fibreuse du navet. Parfum estival de la courgette. 
Senteurs automnales des châtaignes. Flagrance anisée du céleri. Rien de 
tout cela dans la mystérieuse boîte qui circule. Une boîte de métal, 
c’est sûr, froideur au bout des doigts, préservée après le passage 
circulaire dans toutes ces paires des mains. Une boîte rouillée, oxydée,
 en voilà une odeur reconnaissable, qui masque, presque totalement à mes
 narines en perdition, celle de son contenu, objet du jour. L’arôme 
subtil de la masse poudreuse, pailletée, brune, légère, sèche, bruyante,
 savonneuse, alimentaire, n’évoque en moi que des images confuses. Mon 
esprit tourne en rond et rêve alors d’un échappatoire : une tasse de thé
 bien chaude, bouillante même, dans le creux des mains. Un thé vanillé, 
au sucre de canne caramélisé. Ce pourrait être … une image subliminale ?
Deuxième partie :
Exposition de tableaux naïfs et de masques à la médiathèque :
Deux possibilités :
- Entrer dans le tableau, écrire de l’intérieur du tableau : être un personnage du tableau et on se promène dans cet univers.
-
 Dialoguer, inventer un dialogue avec un personnage d’un tableau, ou 
avec un visiteur lambda, ou entre deux personnages de deux tableaux qui 
discutent entre eux.
Durée : 20 minutes
Mascarade
Masque 1 :
Boucles d’oreilles en anneau, nez violet, bouche violette, gros yeux ronds inexpressifs.
- Qu’est-ce que vous faites ici ?
Masque 2 :
Long nez courbé, bouche lippue, yeux verts en amande, menton prononcé.
- La même chose que vous.
Masque 1 :
- C'est-à-dire ?
Masque 2 :
-
 J’attends. J’attends depuis des jours le bon vouloir des passants. 
L’œil avisé des spectateurs. L’admiration de l’amateur éclairé. La 
reconnaissance de l’esthète.
Masque 1 :
-
 Ah bon, monsieur avec sa tronche de traviole et sa bouche pendante de 
pervers exotique espère séduire les esthètes ? Attirer les amoureux des 
arts primitifs ? Inspirer les critiques d’art ? Laissez-moi rire !
Masque 2 :
-
 Non mais ça va bien, vous, espèce de folledingue ! Regardez-là donc 
cette hystérique, cramponnée à son grillage noir, avec ses yeux vides et
 troués, cette face de bois aplatie, ce rouge à lèvres violet - une 
horreur - ! Et ça se prend pour une œuvre d’art, peut-être ?
Masque 1 :
-
 Je n’ai pas cette prétention, moi, môssieur. Je suis là comme témoin, 
témoin muet de l’artisanat africain revisité par des mains innocentes. 
Je guette le sourire d’un enfant. J’espère le rire, la surprise et la 
joie d’un autre. Je témoigne d’un voyage imaginaire, dans des contrées 
lointaines et …
Masque 2 :
-
 Artisanat, ça oui ! On voit bien que, contrairement à moi, vous n’avez 
pas été façonnée par des mains de maître ! Un vulgaire ouvrage de 
débutant ! Cette figure grossière, ces couleurs choquantes, ce matériau 
bon marché … pas besoin d’être critique d’art pour sentir à deux 
kilomètres vos origines locales.
Masque 1 :
-
 Oh ça suffit ! Vous et votre prétention ! Vous vous croyez quoi ? Un 
masque burkinabais Senoufo traditionnel du dix-septième siècle ? Un 
authentique masque Massa camerounais de cérémonie sacrificielle ? Un 
objet sénégalais sacré réservé à l’initiation des jeunes filles ?
Masque 2 :
-
 Ben… oui, évidemment. Cela se voit, non, d’ailleurs ? C’est écrit sur 
ma figure, même, oserais-je dire ! Mes origines sont anciennes, si 
anciennes qu’elles se perdent dans la nuit des temps.
Masque 1 :
-
 Et cette étiquette, là, sur votre dos ? Laissez-moi voir. « Made in 
Taiwan ». Vous vous moquez du monde ! Ni art, ni artisanat ! Objet 
industriel ! Sale objet industriel qui se la joue pièce d’art unique !
Masque 2 :
- Quoi ? Mais non, non ! Ce n’est pas possible, il doit y avoir erreur !
Masque 1 :
- Gardien ! Gaaaardien !
Masque 2 :
-
 Mais puisque je vous dis qu’il y a forcément erreur ! Je suis un 
au-then-ti-que masque Bété ivoirien, issu d’une prestigieuse collection 
muséale ….
Masque 1 :
- Gardien ! Ah, vous voilà enfin. Fichez-moi cet imposteur dehors ! 
Masque 2 :
- … acheté à prix d’or par la ville de Lisieux. Pièce maîtresse de l’exposition d’aujourd’hui… une valeur inestimable….
Masque 1 et le gardien, en chœur :
- Ouste, du balai ! A la porte !
Masque 1 :
- Et maintenant, j’attends la visite des enfants.
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I 
Atelier d’écriture avec Annie 13/12/2014
Le thé.
Des sachets qui, parfois, donnent un gout de papier au breuvage. Du thé qui fait bruler l’estomac. Vraiment, c’est nul, le thé.
Et
 puis l’Angleterre. On ébouillante la théière. On met une cuillerée de 
plus, là encore pour la théière. C’est chaud. C’est bon. Finalement, 
c’est une boisson acceptable.
Et
 puis le petit magasin de la rue de la Convention qui annonce « 100 
sortes de thés différents ». Et là ça devient la frénésie. En plus on 
achète les boites à thé anglaises, kitchs à souhait. Et on teste un 
maximum de saveurs. On apprend à doser. On a des boules à thé de 
contenance et de forme différentes, des tasses qui vont bien. On devient
 snob.
Et
 puis le désert. L’eau qui bout sur le feu de bois. Le thé noir qui 
macère pendant des heures avec la cardamome et le sucre. Un vrai sirop 
mais tellement désaltérant. Les bédouins qui lèvent le bras bien haut 
pour faire couler le breuvage doré dans la tasse sans qu’aucune goutte 
ne tombe à côté. Un retour vers les choses vraies.
Et
 puis la communauté religieuse qui a fait vœu de pauvreté et où personne
 n’aime le thé. Trois malheureux petits sachets dans 15 l d’eau qui 
n’ira même pas jusqu’à ébullition. Petits-déjeuners insipides. 
Découverte de l’ascèse.
Et
 puis les noëls avec la belle boite de thé de luxe, nature ou aromatisé.
 La promesse de moments merveilleux seule ou accompagnée. Certitude 
d’instants chaleureux et reposants.
Et
 puis ce thé que nous n’avons jamais pris ensemble. Rendez-vous lancés 
avec persévérance non aboutis pour raisons diverses. Papo’thé nous 
attend toujours. Plaisir de l’espérance.
Un petit regard en arrière et on se rend compte que le thé est le compagnon le plus fidèle de notre vie.
L
Le
 placard était profond, les portes à glissière très hautes- du sol au 
plafond- risquaient de se décrocher- il fallait les faire glisser en 
douceur- disait mémé. Parfois, je passais de l'autre côté, un espace de 
vingt centimètres me permettait de refermer les portes et d'être 
enfermée. Les bruits m'arrivaient étouffés, peu de lumière, les torchons
 étaient mélangés aux serviettes, le tout rangé au millimètre près. Les 
denrées alimentaires étaient bien disposées comme dans une épicerie. Mon
 étagère préférée et juste au niveau de mon nez était celle des boites 
carrées, rectangles, jaune Bon Banania, à fleur pour les tisanes, usées 
avec des dessins du passé pour les gâteaux secs, rondes pour la poudre 
de chocolat. Celle-ci était bien fermée. Je me souvins du jour où mes 
petits doigts ont insisté doucement, méticuleusement, demi millimètre 
par demimillimètre, le couvercle s'est décoincé mais la boite m'a 
échappée et dans l'espace clos du placard de mémé, la poudre de chocolat
 s'est envolée, c'était amer, pas sucré, j'ai éternué, une fois, deux 
fois, en fermant les yeux. quand j'ai regardé la poudre s'était 
volatilisée mais sur le sol, un lapin brun avec des yeux dorés, des 
moustaches qui frétillaient m'a dit: "Je suis en retard, je suis en 
retard". Il m'a fait un clin d'oeil, m'a fait signe de la patte et vous 
me croirez si vous voulez, c'est là que mon aventure a commencé.
G
J'allais
 lui rendre visite à mes heures perdues, entre deux cours assommants à 
la Sorbonne. Il fallait la gagner, par l'escalier de service, cette 
minuscule carrée sous les toits du Ve arrondissement. Ce qui 
frappait le plus en y entrant, plus que le fouillis organisé, la cuisine
 à même la chambre et la penderie un peu partout, c'était l'odeur, 
sèche, rance et douceâtre, des vieilles boîtes de thé empilées au sommet
 de l'unique étagère. Elle tenait quelque peu du miracle, dans un espace
 où chaque centimètre carré était un trésor, cette collection insolite 
et désuète destinée, peut-être, à accueillir les hôtes de passage ? En 
tout cas, de tous les après-midis mornes et pluvieux où je montai dans 
son perchoir, pas une fois elle ne m'y offrit un thé, issu de ses boîtes
 en ferraille périmée. De mon côté, j'apportai un jour des fleurs, un 
autre du chocolat et même, offense suprême, je finis par lui offrir du 
thé, acheté dans une grande maison parisienne au prix de mes maigres 
économies. Chaque fois, mes présents odorants étaient poliment acceptés,
 mais je sentais nettement qu'ils étaient quelque peu malvenus. Comme 
s'ils troublaient l'harmonie du lieu, générée en quelque sorte, en tout 
cas jalousement gardée, par cette senteur persistante de fer blanc, de 
cacao hors d'âge, de fleurs séchées.
Le
 temps a filé, c'était il y a longtemps déjà. J'ai fini par prendre mes 
aises dans ses quartiers, et avec moi mes odeurs, et nos respirations 
accrochées sur les vitres au long des matinées traînardes, d'après-midis
 de cours séchés, relents de la sueur de nos ébats. L'odeur fanée du 
commencement, vexée, n'est jamais revenue. Et j'ai compris que c'était 
elle qui m'avait plu, m'avait charmé ; j'ai réalisé que sans cette 
fragrance écœurante et austère, ni la chambre, ni son occupante ne 
conservaient son magnétisme sur moi. Peut-être aussi que j'ai grandi, 
que j'ai mûri, et que cet amour est devenu obsolète, ainsi qu'ils sont, 
dit-on, tous destinés à devenir. Mes sentiments ont pris la tournure 
grise et périmée de cette odeur qui m'avait accroché et que, bien malgré
 moi, je cherche encore au détour des rues et dans les cheveux des 
inconnues.
Amis,
 si vous m'offrez l'hospitalité, ayez pitié de moi, ne laissez pas 
traîner sur l'étagère les boîtes de thé parfumé, rances et douceâtres, 
de votre jeunesse.
M
Atelier de février...
Atelier de février...
Sens :
Audition
Le soleil se lève doucement
Tes yeux s’ouvrent lentement
Aujourd’hui est un évènement
Cela fait des semaines que tu l’attends
Quand tu es arrivé la première fois
J’ai senti comme un poids
Tu t’es enfoui dans mes brindilles de bois
Pendant de longs mois
J’ai senti la chaleur
J’ai vu la douceur
J’ai goûté au bonheur
J’ai entendu tes pleurs
Aujourd’hui est un évènement
Tu dois prendre ton envol maintenant
Mes branches te donneront de l’élan
C’est la liberté qui t’attends
Je serais toujours là
Pour sentir à nouveau tes pas
Et peut-être, pourquoi pas,
Accueillir ton enfant à toi
A nouveau, pendant des heures,
Je sentirai la chaleur,
Je verrai la douceur,
Je goûterai au bonheur.
 B
 
 
 
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