samedi 20 mai 2023

Atelier d'écriture du 13 mai 2023

Cette séance était concentrée sur les forêts, d'abord les sensations que l'on peut ressentir en se baladant en forêt, puis l'invention d'un personnage et d'une histoire autour. 



Nathalie

 

Me promener en forêt, c’est….

Me promener en forêt, c’est me sentir toute petite parmi les grands arbres, mes frères. Regarder leur tête, osciller avec eux et avoir le vertige.
Me promener en forêt, c’est sentir le vent sur mon visage, ouvrir les pores de ma peau. Respirer !
Me promener en forêt, c’est marcher sur la mousse qui reçoit mes pas, me sentir légère dans le silence habité du pépiement des oiseaux.


Description d’un personnage de la forêt.

Puis : Ce matin-là…

 

Elle ressemble à une femme, mais ne l’est pas vraiment.
Habillée de feuillages qui changent au gré de la lumière, ses cheveux de lierre descendent en cascade sur ses épaules évanescentes.
Elle porte avec elle les soucis ou autres secrets, les plaintes ou autres aboiements. Elle connaît le langage du vivant : qu’il soit homme, chien ou lichen. Elle entend et comprend.
Elle chante dans le vent.
Elle chatouille dans le pépiement des oiseaux.
Elle réconforte dans la mousse douce et spongieuse. 

Dans le monde des hommes, personne ne l’avait jamais vue, mais chacun en louait les bienfaits.

Ce matin-là, alors qu’elle était penchée sur une fourmilière en plein déménagement, elle sentit quelque chose la saisir.
Elle se retourna et vit un petit garçon aux longs cheveux roux, cartable sur le dos et genoux égratignés. « J’me suis perdu » dit le petit garçon en se mettant à pleurer. 

Jamais personne ne l’avait vue. Jamais personne n’avait pu la voir ni lui parler.
Mais ce petit garçon tout reniflant s’adressait à elle et la regardait timidement.
Elle ouvrit la bouche, et contre toute attente, des mots sortirent de sa bouche, des mots sucrés et réconfortants.
L’enfant les écoutait et s’en gorgeait.
Déjà, il était debout et lui avait pris la main. Elle se laissait faire, se laisser mener à travers la forêt.
Il lui racontait l’école, le concours de billes, son amoureuse, Rose, et aussi son grand-père à l’hôpital.
Le petit garçon n’avait plus peur. Il marchait d’un pas assuré vers l’orée de la forêt, tout en continuant de se raconter.

Il était maintenant loin ; elle ne pouvait le suivre, celui par lequel elle avait vraiment existé.



Hélène


... Me promener en forêt, c'est... :

"lâcher
Sortir de ma vie
Pour entrer dans La Vie
Méditer sur ma vie
Ne plus gérer, contrôler
C'est accueillir
Rêvasser
M'imprégner
De sa vie foisonnante
Mais discrète
Et lente
C'est me laisser surprendre
Ici et maintenant
Du minuscule à l'immense
Hors du temps
C'est me délecter
Ou me méfier
De ses offrandes
C'est me perdre
Pour me retrouver
Vigilance
Respect
Paix. "

 

... Inventer un personnage de la forêt... :

" un sourire accompagné d'un signe de la tête, nous nous croisons et poursuivons chacun notre chemin.
Il a accroché à son bras gauche un beau panier en osier, déjà bien fatigué.
Sa main droite, tenant un couteau à la lame légèrement courbée, se met à l'abri dans la poche avachie de sa veste en toile brune huilée.
Son regard s'est tout de suite redirigé vers le talus, le fossé.
Puis ses pas, lents, mesurés, avec ses croquenots boueux, l'ont conduit vers une petite allée, à peine tracée, entre les fougères et les ronces.
Légèrement voûté pour regarder par terre, il reste cependant grand et élégant. "

 

... Mais ce matin-là... :

" mais ce matin-là son panier restera vide.
Ses yeux suivent, un à un, des petits cailloux blancs, qui se succèdent, régulièrement sur ce sentier étroit.
Où vont-ils le mener ?
Il cheminé longtemps, lentement, rêveur et interrogateur, devant ces pointillés qui filent à l'infini, croit-il, voyant le temps passer.
Mais les rayons du soleil l'éblouissent.
Il arrive dans une belle clairière où, en son centre, les pointillés de cailloux blancs forment, maintenant, un beau grand cercle, bien rond, où trône une souche qui lui donne envie irrésistible de s'y asseoir.
C'est fait.
Les yeux fermés, les genou remontés pour s'y recroqueviller,
Il est parti,
Retrouver son enfance,
La douceur de sa mère,
Les leçons de choses de son père,
Les aventures invraisemblables avec son frère.
Son cœur est nostalgique de ce passé,
Mais il est aussi en paix,
Car ainsi sa vie s'est déroulée entre douceurs, découvertes, joies profondes dans la partage avec ceux qu'il a aimé.
Il sent bien qu'il a de moins en moins d'énergie.
Ce tourbillon de cailloux blancs va-t-il l'emporter pour l'éternité.
Il se sent happé,
Et ça lui plaît. "

 

 

Maïlys

 

Me promener en forêt, c’est mille odeurs qui se mélangent dans mes narines, le lichen, les feuilles, les animaux qui traquent, ceux qui observent. C’est sentir les rayons du soleil sur mon visage, à travers les branches. Ressentir le mystère de ces grands bonhommes majestueux, leur force, leur puissance. Se sentir tout petit et en même temps en harmonie. Poser les mains sur un tronc, laisser l’énergie tranquille me bercer. Observer une feuille se détacher, voltiger, se poser tout doucement.

Me promener en forêt c’est des souvenirs, quand j’étais petite, le dimanche, au bois de Saint Christophe. Promenade avec les parents, course à travers les arbres, aire de jeux dans la grande clairière. Rester immobile et respirer cet air pur. S’imaginer des petits lutins, des elfes, des fées, qui peuplent les légendes et les rêves.

Souvenirs d’automne et de printemps. De rouge, de vert, de fraises des bois et de champignons. Souvenirs d’aventure et sentiment de sérénité.

 

Marcel est un petit lutin très malin. Avec sa silhouette svelte, il se faufile partout parmi les racines, grimpe sur les branches. Il récolte du lichen et fabrique des lits pour les nouveaux membres de la tribu. Très discret, il n’a jamais été aperçu par un humain curieux. Ou peut-être une fois, où il est presque sûr d’avoir croisé le regard d’une petite fille qui cueillant des champignons. Il porte une salopette marron, assortie d’un petit bonnet de la même couleur. Il va rejoindre ce soir sa famille, dormir tranquillement à l’abri du chêne.

 

Comme chaque matin, Marcel s’est levé du bon pied. C’est son moment préféré, cet instant où les rayons du soleil viennent rencontrer sa couche de lichen. Il vit avec les saisons, se lève aux aurores l’été, hiberne une partie de l’hiver. C’est aujourd’hui le premier jour du printemps et les jours rallongent à vue d’œil, rien ne peut le réjouir davantage.

Aujourd’hui, c’est aussi dimanche. Le dimanche, il part faire sa cueillette de champignons tout frais et prépare un petit-déjeuner fastueux pour sa lutine et leurs trois enfants. C’est leur petit rituel hebdomadaire, et c’est aussi toute une expédition !

Pour trouver les champignons les plus goûtus, il doit s’aventurer loin de son terrain de prédilection. Il connait tous les coins de la forêt comme sa poche, mais s’éloigner c’est s’exposer aux regards indiscrets des promeneurs. Cela fait grand débat dans la tribu : les lutins ont toujours vécu cachés, mais certains rêvent de se dévoiler au grand jour. Marcel n’est pas de cet avis, pour vivre heureux, vivons cachés, comme on dit. Sa petite vie lui convient très bien comme ça.

Il enfile sa salopette marron, descend de son chêne, et c’est parti pour le grand tour ! Armé de sa brouette à cueillette, le voilà parcourant les sentiers, marchant d’un pas rapide et assuré, aux aguets du moindre bruit humain.

L’expédition se passe sans encombre, et il arrive enfin à son butin. Les champignons sont si beaux aujourd’hui ! Il hume l’air, s’en lèche déjà les babines. Allez, au travail !

Il ne l’a pas vue, mais pendant ce temps, une petite fille observe toute la scène. Allongés sur le ventre, parfaitement immobile, elle regarde le lutin s’affairer, couper les champignons, remplir sa brouette. Elle ose à peine respirer, n’en revient pas de la chance qu’elle a. Un lutin ! Un vrai lutin, sous ses yeux !

Soudain, Marcel se redresse, il a senti quelque chose. Il se tourne et croise le regard de cette petite humaine qui ne bouge toujours pas. Il se fige, panique d’abord, s’apprête à courir en laissant tout en plan. Mais la douceur de ce regard l’apaise. Ils se fixent un moment, se sourient même. Alors, Marcel ose s’approcher. La petite, qui n’avait toujours pas bougé, rend un doigt que le petit lutin vient serrer.

C’est un moment suspendu, une rencontre magique comme il en existe si peu. Comme s’ils se reconnaissaient. Ils ne parlent pas le même langage, alors ils se sourient, et ça suffit.

Ce soir, Marcel aura peut-être un peu changé d’avis sur la vie cachée. Quant à la petite fille, elle ne racontera jamais ce moment à personne, de toute façon on ne la croirait pas. Mais elle gardera toujours le souvenir de cet instant suspendu et reviendra voir, de temps en temps, son ami lutin.

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