Menacé par Internet et la multiplication des supports numériques, le livre est promis à la disparition. Pourtant quelques éditeurs croient qu’une complémentarité est possible entre papier et électronique. Aperçu de ce mariage à travers deux initiatives.
Les vedettes des salons 2010 du livre (Paris hier, Deauville demain) sont les livres électroniques et toute la panoplie d’accessoires qui permettent de les lire (liseuses, Ipad, téléphone portable, console de jeux…). C’est chouette, c’est moderne. Même s’il a encore de beaux jours devant lui, le bon vieux livre dont on tourne les pages de papier paraît en voie de désuétude. Quelques éditeurs misent pourtant sur sa conservation. A condition de le rendre plus interactif. Au lieu de se placer dans une opposition livre traditionnel contre livre virtuel, ils imaginent des solutions où le numérique complète et enrichit le papier.
Première essai, le livre en réalité augmentée. La réalité augmentée, vous ne connaissez pas ? Rappelez-vous mon précédent article sur l’abbaye de Cluny. Cela consiste à compléter un objet réel par des éléments virtuels. Vous ne saisissez toujours pas ? Voyons l’application dans le domaine de l’édition. Nathan vient de publier dans la collection Dokeo Comprendre comment ça marche. Placez certaines pages du livre devant une webcam et l’ouvrage s’anime. A l’écran, un hélicoptère sort de la page. Plus loin, un camion de pompiers déboule et élève sa grande échelle. Ailleurs, un hors-bord file sur la page transformée en mer. Vous contrôlez le véhicule grâce aux touches du clavier. De quoi émerveiller le jeune public, la cible de ce livre, ... et les adultes aussi.Démonstration vidéo sur le magazine en ligne L'Internaute.
Deuxième essai, l’hyperlivre. En septembre 2009, Robert Laffont, en partenariat avec Orange, sort Le Sens des Choses, ouvrage écrit sous la direction de Jacques Attali. Là aussi, le livre se présente sous une forme classique sauf que, sur les pages, sont imprimés des petites carrés de mosaïques, les flashcodes. Scannez ces pictogrammes avec un téléphone portable : ils agissent comme un code barre. L’écran du téléphone vous propose alors du contenu lié sur Internet : vidéos, graphiques, sondage, forum de discussion. Présentation du livre sur le site de Robert Laffont.
Ces initiatives présentent l’intérêt de conserver une place centrale au livre réel. Mais sont-elles pour autant des solutions d’avenir ? Le livre de réalité augmentée s’approche du gadget : c’est amusant voire fascinant de découvrir les animations mais généralement sans grande utilité. Coup marketing donc ? Pas si sûr car nous ne sommes qu’au début de cette technologie. Les animations vont sûrement devenir de plus en plus intéressantes. Imaginez un guide touristique complétée d’une vue du pays ou de la ville en 3D. Imaginez une notice de montage dont les pièces s’assemblent virtuellement. La réalité augmentée corrige cette faiblesse du livre qui montre tout en deux dimensions.
L’hyperlivre apporte une valeur ajoutée plus évidente au livre. Les flashcodes jouent le rôle des notes de bas de page mais en mieux puisqu'ils peuvent renvoyer vers du contenu multimédia ou vers la source d’une affirmation ou d'une statistique. Reste l'aspect pratique. La lecture des flashcodes nécessite un téléphone connecté à Internet et compatible avec cette technologie, soit seulement 23 % des portables à ce jour. De même, l'utilisation de livres en réalité augmentée requiert un ordinateur équipé d'une webcam et le téléchargement d'un petit logiciel. Rien d'insurmontable mais la perspective de devoir sortir de ma lecture, me lever de mon fauteuil, puis me diriger vers mon ordinateur, l'allumer, lancer le petit logiciel, placer la page devant la caméra pour enfin visionner l'animation, pourrait me décourager. Le pont entre la version papier et le contenu numérique est un peu difficile à emprunter.
Au final, dans le débat opposant livres papier et livres numériques, ces derniers marquent peut-être un point. Ils facilitent le passage entre le texte et l'hypercontenu (informations complémentaires, animation, forum de discussion...) car ils s’affichent sur le même support : l’écran.
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