Un verre et la phrase le Beaujolais nouveau est arrivé
Description : petit verre à pied. Qui semble
être en cristal mais …non. Une petite ébréchure sur le pied. Pas de grande contenance.
Déjà des traces de doigts quand il arrive à ma place.
Souvenir : Voilà ! On a quitté Jérusalem
pour … Lisieux. Normalement on est attendues. On nous a même proposé deux
maisons au choix. Nous sommes tout feu tout flamme. Nous ? Deux petites bonnes-sœurs
venues fonder une nouvelle maison à Lisieux.
A Lisieux : personne ne nous attend. Nous sommes à la
rue. Envolées les belles promesses. Nous trouvons quand même un refuge mais …
Alors, objectif n°1 : trouver un toit. On en parle
autour de nous. On fait marcher le réseau catho de Lisieux qui est quand même
pas mal grand. Et LA solution. Les sœurs de l’hôpital nous proposent une maison
à Firfol. Elles y accueillent leurs familles et amis en été. Nous avons six
mois devant nous pour trouver une solution
pérenne.
La maison est très belle. Vraie maison de maître normande.
Entièrement meublée et aménagée avec des meubles magnifiques, héritage du temps
où les religieuses devaient apporter une dot pour entrer au couvent.
Mais, nous, nous n’avons en propre, rien d’autre qu’une
unique valise chacune contenant nos quelques affaires personnelles. Et une
voiture quand même ! Rien à manger, rien à ranger. Et pas de revenus.
Alors, nous avons fait le tour des popotes comme on dit dans
notre jargon. On a fait appel à la solidarité. Et ça a payé : 48 kg de
pâtes pour … deux ! Des pâtes bon marché, des pâtes normales, des pâtes
« deux œufs frais au kilo », des pâtes plates, des pâtes longues, des
pâtes courtes …
J’ai classé toutes ces pâtes sur une grande étagère : les
pâtes du vendredi, les pâtes des jours ordinaires, les pâtes des invités, les
pâtes de fête …
Bon, c’est pas tout d’avoir des pâtes pour les mois à
venir ! Encore faut-il avoir une assiette pour les manger. Donc,
inspection des divers buffets et armoires du rez-de-chaussée. Et là ! des
verres, des verres et encore des verres. Presque tous à pied, presque tous en
cristal. Eux aussi héritage du temps des dots. Ciselés ou pas, à vin ou à eau,
à liqueur ou à champagne … des verres magnifiques qui brillent à la lumière du
soleil.
J’ai classé tous ces verres : les verres du vendredi,
les verres des jours ordinaires, les verres pour les invités, les verres de
fête.
Et j’ai même repéré un service de verres qui feront de très
beaux « verres pour l’évêque » !!!
Le deuxième
Exercice
Bienvenue chez moi
En Pays d’Auge.
Avancez,
avancez,
Un
en-cas vous attend.
Je vous
propose ensuite,
Originalement,
une visite
Lexovienne
Approfondie.
Installez-vous
confortablement
Sur un
des sièges du petit train.
Nous
traversons le parking
Ouvert
toute la journée,
Utile à
savoir,
Vers la
basilique
Elevée
sur la colline
Avec les
dons des paroissiens
Unis
dans ce projet.
Ensuite,
en route vers les Buissonnets
Situés
sur la hauteur de Rocques où
Thérèse
a passé son enfance.
Après ce
détour,
Retour
en centre-ville.
Régalade
avec le scofa des carmélites.
Initiation
à la vie de Sainte Thérèse et
Visite
de la Cathédrale.
Enfin,
retour à la gare !
L
1 objet : verre à pied
de
verre composé
dépoli
ébréché
côtelé
épais
bien stable sur son pied travaillé
Ouvrir la porte grinçante
De l'armoire normande
Où repose la vaisselle du dimanche
Etre rassurée par sa présence
Au milieu des verres en cristal
Ou en verre plus banal
Ceux à porto
Ceux à champagne
Ceux à vin
Ceux à liqueur
Plus ou moins assortis
Sortir juste celui-là
Comme tant et tant de fois
Quand tu étais encore là
Mais on ne trinquera pas
L'emporter avec moi
Dans mon buffet en formica
Si loin de là
Mais si proche à la fois
Encore plus il usera
Jusqu'au dernier fracas.
L'automne bat son plein
Que je l'aime ce refrain
Les noisettes sont dans le panier
Les mûres ont fait des confitures
Les noix dans la salade nous régalent
Les châtaignes grillées crépitent dans la cheminée
Les chanterelles pointent le bout de leur nez
Le beaujolais nouveau est arrivé
Le vert nous a, en partie, quittés
Place à la chaleur des couleurs
Rouge orangé jaune brun mordoré
Allons-y gaiement
Profitons-en
Elles réchauffent nos cœurs
Et pas seulement.
H.
Le verre.
Transparence
floutée par l'usage répété, pied court et perlé. Sa lourdeur en main confirme
son aspect trapu mais cache sa fragilité, révélée par un éclat sur le pied:
destiné à une table commune et non des grands jours qui appellent le cristal!
Sa facture
ancienne m'a fait visualiser un tableau d'Edgar Degas, intitulé
"l'absinthe" où le verre coiffé de la cuillère finement découpée
supporte un sucre sur lequel s'écoule le liquide verdâtre.
La scène se
passe dans un café, l'homme assis contemple le verre, le regard vide, épaules
basses, costume sombre: Quel deuil veut-il noyer dans cette flaque émeraude?
"le
beaujolais nouveau vient d'arriver"
Printemps,
été, hiver, automne.
De la
lumineuse chaleur estivale aux festives lumières de Noël, les jours s'enfoncent
vers les ténèbres hivernales, troublées par les éclats de jaunes, rouges et
ocres des feuilles automnales...
Ce si long
mois de novembre qui appelle décembre... et puis un avant-goût des
"Fêtes", réveil festif: " le beaujolais nouveau est arrivé"
Le slogan s'affiche partout, prétexte à retrouvailles, chaleur humaine en
contrepoint à la froidure extérieure. Rendez-vous lumineux... patience Noël est
proche!
D
Coucou
coucou, ça y est, il est l'heure de manger
Non pas le
grand diner ou bien le déjeuner
Mais une
collation avec du bon saucisson
Non je ne
t'oublie pas, toi qu'on a déposé là
Tu n'es peut
être ce verre à pied, mais un verre sans pied
Qu'on
remplit de bon souvenir, sans forcément le finir
Oyé oyé le
beaujolais est arrivé
Maman qu'est-ce
que c'est ?
C'est une
boisson à déguster
Ah c'est
comme du lait !
Mmm pas tout
à fait. Le beaujolais est destiné aux personnes les plus âgées.
Je ne peux
pas y gouter
Non tu peux
juste l'admirer
Mais maman
pourquoi crier de son arrivée ? il né comme un bébé ?
Chaque
année, le beaujolais rené dans son champ agrémenté, il est attendu par ses
ainés.
M
Tristesse un verre … seul. Aussi joli soit-il. Image incongrue. Objet de
partage par excellence, il se multiplie à l'infini. Pas de bon moment sans
verre à la main. Symbole de bonne humeur et de discussions infinies. Légèreté
de l'être, fin de soirée, promesse de lendemains qui chantent.
Seul on le vide sans y penser. Tentative pour chasser une idée plus ou moins
noire. Sans succès. Lourdeur du pas et de la tête. Lendemain empesé et
mélancolique
C
L’évidence
saute aux yeux. C’est un piège à guêpe. Quand elle est prise, en général, elle
chante, plus souvent elle vouzounne. Elle est nerveuse, agitée et même
contrariée. Il est inutile de s’imaginer à sa place, ce n’est pas
vraisemblable. Enfants, malfaisants à plein temps mais sur une petite échelle,
nous la posions : l’échelle ; attrapions de quoi pour attraper la
guêpe vivante sur la vitre. Les gobelets opaques ne convenaient pas, seuls les
verres valorisaient le plaisir de la chasse. Il fallait un équilibre de
fiabilité entre les carreaux et le verre, le coup sec et cependant moelleux.
Eviter le cristal de la grand-mère, coup d’œil, velléité le petit animal piégé
se faisait du souci et ronflait comme une abeille qu’elle était. Souvenir d’enfance.
B
Verre à
apéritif ou à vin. Forme ancienne. Un peu ébréché au pied. Il y en avait
surement beaucoup dans les maisons autrefois.
J’ai
déménagé. Cela m’est arrivé souvent mais comme je n’accumule pas, cette fois-ci
beaucoup de choses m’ont été données…et parmi toutes les choses reçues il y a
cinq grands verres ballons à eau peut-être remis par ma sœur. Elle les a
trouvés au fond d’un placard, bien enveloppés dans une boite dans la maison de
mes parents. Ni elle ni moi ne les avions vus auparavant. Nous ne soupçonnions
même pas leur existence. A qui ont-ils apartenus auparavant ? Comment
sont-ils arrivés là ? Viennent-ils de chez mes grands-parents…ou d’ailleurs ?
Mystère ! Aujourd’hui, ils sont alignés sur l’étagère de mon placard à
vaisselle, je ne m’en sers jamais, mais ils sont là, témoins de vies que je ne
connais rien. Parfois je les regarde et me plais à rêver à ce qu’a pu être la
vie de ceux qui les ont utilisés. S’imaginent-ils, ces gens inconnus, que leurs
verres, par delà les générations, sont entre mes mains. Et après… qu’en
ferais-je ?
Beaujolais…
beau : racé, élégant, fin, sûr de lui peut-être… Jo ? comme l’annonce
de joie ou de joli. Belle couleur bonne odeur et si l’on goûtait ? Lait…laid ?
Ah non, je ne comprends plus, peut-être beau et laid à la fois ? Simple
affaire d’appréciation et si on peut mettre de l’eau dans son vin on ne peut y
mettre du lait. Beurk ! Pourtant le Beaujolais nouveau est arrivé. Alors
buvons !
M
Verre sur
pied, bien sur son piédestal rond,
Sculpté à
souhait, clinquant à souhait,
Dans les
moindres espaces de ta corolle
Tu t’ouvres
au ciel comme un calice
Tu n’es pas
si lisse que cela
Tu t’offres
avec ta corolle à la lumière
Je te tends
vers les cieux
Même si je n’en
crois pas mes yeux
Je pense au
vin divin que tu contiens
Un vin
couleur sang, sang que tu me donnais à boire
Un ecclésiastique
qui saluait ton clinquant de cristal, de mon enfance à mon état d’adulte.
Enfant
buvant dans cette coup jusqu’à adulte buvant le breuvage de Bacchus, je
subodorais tes odeurs, ton parfum, à travers tes éclats de cristal.
Viré Clissé,
Macon, Fleury, Juliénas, Moulin à vent, Beaune, un peu plus haut, vous êtes
tous des copains dans mon verre tulipe que je bois sur le zinc d’un bistrot où
la patronne maquillée comme une geisha veut bien me servir à boire. Hé dis
donc, lui dis-je. Pas de faux-col, s’il te pait. Oui comme pour un malade me
dit-elle. Hé faut que cela se fête, le Beaujolais est arrivé !! Tiens ma
cousine arrive, alors un verre de plus, après avoir bu le vin divin, bois donc
du Beaujolais ; si tu bois du Beaujolais, tu meurs. Si tu n’en bois pas,
tu meurs quand même. Alors bois du Bon Beaujolais. C’est à boire, c’est à
boire, c’est à boire qu’il nous faut o o o o, non de non !!
M
Sac en
papier serré. Petit verre esseulé biseauté pied un peu cassé.
Petit verre
de mon beau-père dans le buffet normand rangé- du café rue Battant à Besançon,
chat sur le radiateur, patronne à la Arletty, rouge à lèvres façon geisha- des
foires à tout dépareillés par deux ou trois rarement par six- de l’apéro à la
Francis James avec les mouches qui vrombissent passage éclair dans la fraiche
cuisine où le porto est servi accompagné d’un boudoir. Trinquons à la vie, au
temps qui passe, au lave-vaisselle qui massacre la transparence. Trinquons au
retour du torchon ? Que non mais trinquons.
Le
Beaujolais dans les années 70 était un vin léger, peu alcoolisé qu’il fallait
parfois sucrer. Il se buvait jeune. Il ne se prêtait pas à la conservation. Aux
vendanges, soupe et petit salé le matin pour démarrer.
La planète
se réchauffe et le Beaujolais monte en degré, inutile de le chaptaliser il
aspire à être catalogué comme ses voisins, les bourguignons.
Mais en
automne quand il est nouveau, il redevient le vin populaire. Quand le
Beaujolais nouveau arrive, c’est la liesse toute la nuit, ça trinque, ça boit,
ça regarde la couleur, ça hume les odeurs…
G
C’est un petit verre à pied, un verre d’autrefois ! On
croirait du cristal mais non, il n’a pas la même texture. Il vient peut-être
des grands-parents ! Je l’ai trouvé au grenier, dans une armoire
mystérieuse ! Quand j’étais enfants, pas le droit d’y toucher, il
fallait le garder pour toujours ! il était précieux ! on revoit les
fêtes d’autrefois, la famille qui se réunit autour d’un verre. Combien de
lèvres l’ont touché et combien de mains l’ont pris ? Il pourrait nous
raconter des histoires. Il faut être prudent et ne pas le casser ! Mais
est-ce si important, un verre ancien ? Un jour, je l’ai cassé sans faire
attention et j’ai eu l’impression de ne plus avoir de passé et de dire au
revoir à mes racines.
Qui est arrivé ce matin ? Un petit nouveau !
Il vient d’où ce petit nouveau ? Du Beaujolais !
On pourrait faire une fête pour l’accueillir et lever nos
verres pour la fête, mais il n’y a qu’un verre ! Cela va être difficile et
pourtant : C’est un grand jour !
Car « Un Beaujolais nouveau est arrivé »
On fera passer le verre ! Mais pour trinquer prenons des
verres sans pied se sera plus simple.
Décidément, ce matin on aura bu toute la matinée !
D’ailleurs je ne sais plus si j’écris ou si je bois ?
J
D N S M D B