vendredi 24 avril 2009

Des nouvelles d'ailleurs, mmm !


Ce sont des émissions entendues "dans le poste" qui ont guidé mes dernières lectures.

C'est l'écrivain chilien Luis Sepùlveda qui, acculé à un exil européen à l'arrivée de Pinochet, m'a mis l'eau à la bouche avec ses éclats de rire en affirmant qu'une nouvelle était plus périlleuse à écrire qu'un roman puisque, dans le roman, si on ratait un chapitre on pouvait se rattraper par la suite.

Je me suis alors lancée dans sa Lampe d'Aladino et autres histoires pour vaincre l'oubli publié chez Métailié (l'éditeur à la salamandre), le titre étant à la hauteur exotique du contenu de ses nouvelles. On y sent un amour sans bornes pour son pays et l'Amérique du Sud d'autant plus profondément attaché à ces racines qu'il en a été privé de longues années (les épigraphes sont là pour le rappeler).
Ses héros sont aussi denses que ses décors : l'agonie d'un Portugais perdu au fond du détroit de Magellan et soutenu par l'Indien patagon déterminé à apprendre à écrire. Pourquoi ? Pour pouvoir garder ses rêves à l'abri de l'oubli !
La pluie longue et monotone observée par des hommes désabusés, dans un hôtel jadis exubérant au milieu d'une forêt dévoreuse des splendeurs passées.
Un Libanais vendeur de miroirs magiques au coeur de l'Amazonie. Magiques ? Evidemment, puisqu'ils avaient le pouvoir de ne refléter que ... le bon côté des gens !
Et bien sûr des histoires d'amour très fortes où chacun se donne et puis se perd, où la quête du bonheur et du plaisir riment avec la générosité de chacun.

Entre rêve et réalité, tout au long de ces courts récits, on ressent l'authenticité de ces hommes et ces femmes pour lesquels Sepùlveda a une infinie tendresse.

Entre rêve et réalité, oui c'est bien ça, car certaines histoires sentent la marijuana à plein nez ; et loin de l'Amérique latine, ce sont les volutes épaisses des vieux fumeurs de haschich qui enveloppent cet autre recueil.

Cela se passe en Egypte où le puissant auteur Alaa el Aswany nous offre un bijou de nouvelles intitulé J'aurais voulu être égyptien (Actes Sud), toutes se déroulant en plein Caire, bien loin des yeux touristiques.
Ce livre est à lire dans sa totalité, je m'explique : il faut en lire la préface, à elle seule un régal, où l'auteur détaille l'importance de l'illusion créée autant en littérature qu'au cinéma.

Premier texte de l'auteur du fameux Immeuble Yacoubian, voici une autopsie de la société cairote, avec les absurdités des codes d'apparence et de l' extrémisme religieux qui ont valu à El Aswany de sérieux démêlés avec la censure de son pays.
Dentiste le jour, il aime arpenter les quartiers sombres la nuit parce qu'il dit avoir besoin de ces deux univers pour nourrir son écriture.
La première du recueil "Celui qui s'est approché et qui a vu" (100 pages !) pose le personnage d'Issam désorienté (!) par sa fascination pour le monde occidental contre l'hypocrisie du monde qui l'entoure.
Les individus y sont tendres ou cruels, n'hésitant pas à s'envoyer des gifles ou à se hurler dessus quand ils sont contrariés.
Ils sont piégés par un obscurantisme tangible et se déplacent dans des cadres variés : une famille, un individu isolé, une salle de classe, une université, une relation amoureuse. Souffrance au travail, à l'école, souffrance due au handicap..., des situations racontées avec férocité, sans complaisance aucune !

En plus de sa préface à ne pas manquer, ce livre nous offre un deuxième bonus : j'ai entendu El Aswany exprimer son enthousiasme d'avoir été traduit par Gilles Gauthier et on le croit volontiers, puisque le résultat en est simplement gouleyant...

A travers ces courts récits, l'illusion d'exotisme est garantie !

1 commentaire:

lea a dit…

Bonjour,
Je trouve votre blog très enrichissant, cela change de tout ce que l’on peut lire habituellement. Bonne continuation et merci.